Focus

Lettre d’Actualité / Février 2020

1. DROIT PÉNAL DES AFFAIRES

AFA : publication du guide pratique « Les vérifications anticorruption dans le cadre des fusions-acquisitions », 17 janvier 2020 

Après avoir rappelé que la loi Sapin II n’impose pas « l’évaluation d’une société dont l’acquisition ou la fusion est envisagée » et que ses recommandations ne sont pas juridiquement contraignantes, l’AFA propose un certain nombre de « vérifications anticorruption » à effectuer aux différents stades de l’opération de croissance externe, sous le contrôle d’un responsable des vérifications anticorruption désigné par l’acquéreur. L’AFA souligne l’enjeu de ces vérifications qui peuvent influer sur le prix d’acquisition compte tenu des conséquences réputationnelles, juridiques et financières que pourraient entraîner, pour l’acquéreur, une opération d’acquisition ou de fusion avec une société ayant commis des actes de corruption.

Blanchiment : présomption de blanchiment par l’absence de justification des fonds placés, crim., 4 décembre 2019, n° 19-82.469

La Cour de cassation a appliqué, en matière de travail dissimulé, la présomption de l’article 324-1-1 du Code pénal, issu de la loi n°2013-111 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Cet article permet de favoriser la preuve de l’infraction de blanchiment par l’établissement d’une présomption simple d’illicéité de l’origine des biens ou des revenus en l’absence de leur justification.

 

2. RÉGLEMENTATION FINANCIÈRE

ACPR – Escroqueries : communiqué de presse de l’ACPR établissant une liste noire de sites Internet ou d’entités, Communiqué de presse de l’ACPR, 6 janvier 2020

L’ACPR a ajouté 199 nouveaux sites Internet ou entités proposant en France des crédits, des livrets d’épargne, des services de paiement ou des contrats d’assurance sans y être autorisés.

AMF : gestion des conflits d’intérêts et information des mandants, Sanctions, 20 déc. 2019, SAN-2019-18

Dans sa décision du 20 décembre 2019, la Commission des sanctions de l’AMF a prononcé un blâme et une sanction pécuniaire de 50.000 euros à une société de gestion de portefeuille pour des manquements à ses obligations en matière de gestion des conflits d’intérêts et d’information de ses mandants. Le président de cette société a été condamné à une interdiction d’exercer pendant cinq années les activités de gestion d’actifs pour le compte de tiers et de gestion collective et le directeur général a été sanctionné d’un blâme.

 

3. CONTENTIEUX CIVIL ET COMMERCIAL

L’interdiction de gérer ne s’étend pas au mandat de membre du conseil de surveillance, com., 8 janvier 2020, n° 18-23.991

L’interdiction de gérer ne concerne pas les membres du conseil de surveillance d’une société anonyme qui, en vertu de l’article L. 225-68 du Code de commerce, n’exercent qu’une mission de contrôle de la gestion de la société par le directoire, et non une fonction de direction.

Chèque : responsabilité de la banque présentatrice lors de la remise d’un chèque portant les noms de deux bénéficiaires, com., 27 novembre 2019, n° 18-11.439

La Cour de cassation a établi que la juxtaposition du nom de deux bénéficiaires sur un chèque ne constitue pas, en elle-même, une anomalie apparente. En revanche, la banque présentatrice doit, lors de la remise du chèque portant une telle mention par l’un des deux bénéficiaires pour encaissement à son seul profit, s’assurer du consentement de l’autre, sauf circonstances particulières lui permettant de tenir un tel consentement pour acquis.

 

4. CONVENTION JUDICIAIRE D’INTERET PUBLIC

CJIP – Airbus : corruption d’agent public étranger et corruption privée à l’occasion de contrats de vente d’avions civils et de satellites, ordonnance de validation du président du Tribunal judiciaire de Paris, 31 janvier 2020, PNF-16 159 000 859

Aux termes de la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) conclue avec le procureur de la République financier (PRF) concernant des faits de corruption, Airbus s’engage à verser une amende d’intérêt public de 2.083.137.455 euros et à faire évaluer l’effectivité de son programme de conformité par l’AFA pendant trois années. Les investigations ont été conduites par une équipe internationale constituée du PNF, du Serious Fraud Office britannique (SFO) et parallèlement à l’enquête ouverte par le Department of Justice (DOJ) des Etats-Unis et le procureur fédéral du district de Columbia (Washington DC).

CJIP – Bank of China Limited : blanchiment de fraude fiscale, ordonnance de validation du président du Tribunal judiciaire de Paris, 15 janvier 2020, P 13 200 000 369 

Aux termes de la CJIP conclue avec le procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Paris concernant des faits de blanchiment de fraude fiscale, Bank of China Limited s’engage à verser une amende d’intérêt public de 3.000.000 euros et des dommages-intérêts d’un montant de 900.000 euros à l’administration fiscale française. Bank of China Limited était mise en cause pour avoir en Chine, d’avril 2012 à mai 2014, permis à ses clients de faire échapper une partie importante de leur chiffre d’affaires à l’impôt sur les sociétés et à la TVA en France. En effet, la banque a accepté d’ouvrir des comptes et de détenir des sommes dans ses livres sans demander au client de justificatifs, ni respecter les réglementations anti-blanchiment d’identification du client et de vigilance sur les transactions.

 

5. DROIT DE LA PRESSE ET DES MÉDIAS

Injure publique : première illustration de la condamnation de propos injurieux à l’égard de personnes en raison de leur identité de genre, crim., 7 janvier 2020, n° 19-80.796

La Cour de cassation a mis en œuvre les dispositions protectrices de la loi du 27 janvier 2017 qui ont notamment modifié l’article 33 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881 en réprimant plus sévèrement l’injure publique commise à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur « identité de genre ». Elle condamne, à ce titre, les propos d’un individu qui a publié sur son compte Twitter le message suivant : « Transgenres. Les malheureux qui veulent changer de sexe sont des vicieux et des malades qui relèvent de la psychiatrie ».

Enregistrement des audiences : Conformité à la Constitution de l’interdiction d’enregistrer, fixer ou transmettre l’image ou le son au cours d’un procès et validation de la pratique du live-tweet, Conseil const., décision n° 2019-817, QPC du 6 décembre 2019 

Le Conseil constitutionnel a jugé que l’interdiction prévue par l’article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est conforme à la Constitution car elle permet de prévenir la diffusion des images ou des enregistrements susceptibles de perturber les débats. De plus, il valide, sans la nommer, la pratique du live-tweet des journalistes en affirmant que les audiences sont ouvertes au public et qu’il a la « possibilité de rendre compte des débats par tout autre moyen, y compris pendant leur déroulement ».


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